La question clé des investissements publics

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Alors maintenant que nous avons affirmé qu’il va falloir répondre à cette demande très importante rapidement, plusieurs autres questions se posent. Pourquoi ne s’en est-on pas aperçu avant ? Que faut-il faire ? Quel rôle doit jouer Paris là-dedans ?   

 

Pourquoi ne s’en est-on pas aperçu avant : question simple et essentielle.

D’une part parce que le débat de fond au sujet des questions de transport n’a pas été placé largement sur la place publique, confiné qu’il était aux mains de quelques décideurs dans des lieux peu connus. Sans contre-pouvoir, le pouvoir s’exerce mal.

Il y a eu historiquement deux phases de débats importantes sur les transports publics en Ile-de-France. La première à la fin du 19eme siècle et au début du 20e siècle, où il est apparu évident que Paris était en retard, et qu’il devait se doter d’un réseau de métro. La révolution industrielle était passée par là.

Cela fut long à décider, compliqué. Mais une fois la décision prise, on a été enfin efficace : plus de 90 kilomètres de métro en 15 ans, une bonne partie de notre réseau actuel. Bravo à nos arrières grand-parents. Mais gros bémol, la conception pariso-parisienne : un réseau bien maillé à Paris, mais qui n’a pas anticipé le développement de la banlieue.:

60 ans plus tard, on avait peu avancé. La politique d’investissements publics des années 60 a permis de relancer la machine, alors que le réseau vieilli était également saturé, et le développement de l’agglomération était programmé. On a donc lancé les RER.

 

Bonne idée, mais les réseaux à grande capacité effectivement réalisés ont été les radiaux, ceux traversant Paris. Aucune ligne de rocade n’a permis de relier entre eux les RER, et les prolongements au-delà de Paris mêlés aux souvent aux trafics existants sur les lignes SNCF. Avec les RER, c’est bien une deuxième phase d’investissements historique, mais insuffisante et très rapidement dépassée, alors que dans le même temps on empilait les rocades autoroutières (périph, A 86, francilienne).

Tout cela a été décidé de façon très gaullienne, dans les hautes sphères administrativo-politiques. Pas ou peu de démocratie avec les élus, alors pas la peine de penser à la démocratie participative, à l’association des citoyens, associations, …

Et résultat, saturation rapide. Dès les années 80, la colonne vertébrale de l’ensemble, le RER A est saturé. On pense toujours de façon administrativo-politique aux investissements à réaliser pour le désaturer. La SNCF propose une nouvelle ligne de RER (le E), la RATP une ligne automatique au coeur de Paris, qui deviendra la ligne 14. Coup de chance, on décide en 1989 de faire les deux pour contenter tout le monde, et heureusement, car elles sont déjà en passe d’être saturées moins de 20 ans après leur mise en services.

  

La décision de 1989 est un choix de « rattrapage ». On essaie de parer au plus pressé pour éteindre l’incendie de la saturation des RER qui viennent à peine d’être construits. Résultat : en 2006, la ligne 14 est elle-même déjà en voie de saturation, moins de dix ans après son ouverture.

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Le constat est clair : depuis les années 70, on a beaucoup trop peu investi dans les transports publics. Cela ne doit rien au hasard du point de vue politique. Investir moins dans des infrastructures publiques est bien dans l’air du temps libéral. Les autoroutes à péage voulues par le conseil général des Hauts-de-Seine, A 14 et A 86 à l’ouest, ont elles progressé à grande vitesse, et la réalisation d’une nouvelle voie à péage en-dessous de la RN 13 à Neuilly fait partie des priorités de certains.

 

La région parisienne devient ainsi l’expression caricaturale d’une vision de la société : la disette d’investissements publics a pour effet de dégrader les conditions de transport des plus grands nombres, et parallèlement, on organise les conditions de déplacement des privilégiés grâce à des voies « réservées » de fait grâce à la ségrégation par l’argent. En polarisant tout cela géographiquement autour du pôle d’affaires de La Défense.  

Ce qu'il reste de la navette sur rails qui descendait 
du Pré Saint Gervais par la rue de Ménilmontant
 

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